Georges Yu est donc parti tutoyer les étoiles…

« Ni dieu, ni maître », une règle de vie, la sienne. Georges Yu goûtait peu aux protocoles de toutes sortes. Les seules élégances qu'il se plaisait à entretenir étaient celles du coeur, celles de l'esprit. « Ni dieu, ni maître », mais écoute, rencontre, échange avec l'autre. Et puis goût pour la fraternité, la solidarité, l'amitié entre les peuples. Georges Yu était un homme du monde. Ami de tous les peuples du monde. Noir, jaune, rouge… peu importait… ce qui comptait était la force et la sincérité du coeur…

Georges Yu, homme libre… a commencé sa carrière comme comédien à Paris. C'était l'époque où, nous le rappelle son frère Eugène, il mangeait de la vache enragée. Comme beaucoup de jeunes survivant dans le monde artistique d'alors, il était prudent de faire ses emplettes… au cours de vernissages ou d'inaugurations diverses. Artiste, il n'en fallait pas moins vivre et se faire « picasssiette » à l'occasion de soirées huppées réunissant le gratin parisien… ceci expliquant peut-être cela et les pudeurs auto protectrices du personnage expliquant, en partie, son esprit taquin et facétieux…

Georges Yu commença donc sa carrière dans le théâtre et le cinéma. Il joua notamment pour Jean- Pierre Melville et Jean Cocteau dans « Les enfants terribles » en 1950. Il tint, en 1959, le rôle de Chapuis dans « Le déjeuner sur l'herbe » (1959) de Jean Renoir et apparut dans divers films de fiction français ou allemand. A la même époque, il travaille pour la cinémathèque de Paris où il a été embauché par Henry Langlois, personnage illustre du monde du cinéma et créateur de la grande cinémathèque.

Ses retours à Liège sont nombreux. Liège est sa ville natale, sa ville de coeur. En 1956, profitant de son séjour en la cité ardente, il réalise « Les Rues de Liège » avec un ami cameraman où il investit toute l'affection que lui inspire la ville de son enfance. Ce film sera diffusé en de nombreux festivals et se verra même présenté, à l'époque, à la télévision polonaise ! Plus tard, bien plus tard, ce film connaîtra une autre destinée encore ! …

La fin des années '60 verra son retour définitif dans la cité ardente. Il prend alors part aux premiers feux du centre de Liège de la RTB où il mène, à la radio, l'émission consacrée à l'immigration italienne, « Ciao Amici ». Robert Stephane, alors en charge du Centre de Liège de la RTB (pas encore « f ») se souvient : « Georges Yu fut un des êtres les plus rares (le plus rare, le plus différent) que j'ai rencontré dans ma vie professionnelle et dans ma vie tout court. Et cela dès le premier contact, quand il a rejoint Liège et le Centre RTB-Liège. Il mettait ses différences au service de tous. Une personne d'origine chinoise présentant une émission pour les Italiens de Belgique... Imaginez !! ... Le " Vivre ensemble" comme règle tellement d'actualité aujourd'hui … »

Dans les années '70, Georges Yu commence une longue carrière à la télévision au cours de laquelle, parmi bien des missions, il travaille pour « L'Europe des Régions », « Cinéscope », « Magasine F » ou « Sans rancune », l'émission « caméra cachée » de la RTB d'alors.

A cette époque, il s'investit également dans la série « Itinéraires » et réalise quelques portraits, à la fois sociaux et chaleureux, au nombre desquels « Bonjour Facteur » décrit l'image d'une profession alors précieuse et respectée pour le lien social, le lien humain que ses travailleurs établissent au quotidien. Dans les années'70 encore, son affection pour sa ville l'amène à réaliser « Une nuit ce jour-là », portrait nocturne et poétique d'une ville parmi d'autres villes du monde. Il recevra, peu après, une « Antenne de cristal » décernée par l'union de la critique de l'audiovisuel récompensant, en la circonstance, l'une des meilleures émissions de la Télévision belge.

Dans les années '80, il travaille régulièrement pour l'émission « Télétourisme » produite par Guy Lemaire qui évoque, à son tour, ce personnage créatif, chaleureux mais goûtant peu aux contraintes administratives en tous genres : « Georges, se rappelle-t-il aujourd'hui, c'était une élégance de chaque instant, un vrai talent et une pudeur unique. Il a vécu en poète… c'était aussi, et par ailleurs, un poète de la « note de frais » !!! … ».

L'année 1987 verra le Liégeois d'origine chinoise faire son premier voyage jusqu'en Chine ! Cette année-là, en effet, il accompagne, avec une équipe de télévision, 300 jeunes Belges partis en « représentation culturelle et économique » avec le train Bruxelles-Pékin. Toute une aventure dont il ramènera des images pour le moins précieuses. Un « Strip tease » suivra avec « Voyage autour de ma chambre ».

Les années '90, le verront quitter la RTBF mais pas le cinéma documentaire. En 1993, à l'occasion d'une soirée culturelle et associative dans le quartier St Léonard de Liège, est projeté… « Les Rues de Liège », ce film qu'il avait réalisé en 1956 et qui était resté, oublié dans une cave, pendant près de 40 ans ! « Ca n'intéressera personne, ce truc-là, p'tit con », me dit-il, alors que je venais de découvrir une vieille bande 16mm… Il me fallut dès lors déployer des ruses de sioux pour parvenir, un jour, à sortir ce film de chez lui pour en faire l'objet d'une soirée publique. Profitant d'une absence pour un Pipi paternel urgent, je couru dans la cave, remontai rapidos la vieille bande, la planquai dans le coffre de ma voiture… puis revint, avec un air d'ange, l'attendre dans la cuisine…

« Les rues de Liège » (1956) est projeté à l'église Ste Foy dans le cadre d'une semaine culturelle et associative. Il n'y eut jamais autant de monde ! Le curé vint même me voir à la fin pour nous demander d'autres séances car il n'avait jamais vu autant de personnes présentes dans son église !

Le succès avait donc été énorme. D'anciens collègues, présents dans la foule, Jean-Claude Riga, réalisateurproducteur, le sollicitent : pourquoi ne pas réaliser une « suite », un regard contemporain - nous sommes en 1993- sur le Liège de 1956 ?

Une aventure commence alors qui durera longtemps. « Les rues de Liège, balade à deux temps, 1956- 1996 » est présenté à plusieurs reprises au cinéma Le Parc, à la télévision belge, sur TV5 international, diffusé à des milliers d'exemplaires en cassettes VHS ! En 2003, preuve de son caractère « universel », le film est même diffusé sur CCTV6, l'une des chaînes nationales de la télévision chinoise et se voit encore, régulièrement présenté, diffusé, y compris à la RTBF ! A cette heure, « Les rues de Liège, balade à deux temps, 1956-1996 » connaît une nouvelle vie en format DVD et augure encore de fort beaux jours de diffusion… tant ce film se trouve à la fois enraciné dans notre ville et porté à jeter un regard fraternel sur le monde tout entier…

Georges Yu a quitté ce monde comme il a vécu : en homme libre ! Au retour d'une promenade, une chute lui a fait perdre conscience avant de lui faire perde la vie.

Ses films ressemblent à l'existence qu'il a menée. Marcher, flâner, déambuler, rencontrer, voir des gens, des visages, des singularités. S'étonner, parler, comprendre, aimer… ses films documentaires expriment cette sensibilité, cette passion instinctive qu'il avait de nouer la vie réelle à la poésie. Un peu comme, dans le domaine de la peinture, un Chardin, au 18e siècle, rendait compte des rumeurs d'une révolution qui monte, tout en calme, en finesse et en douceur… l'air de rien…

Cinéaste, réalisateur, militant infatigable pour le lien humain, le vrai, le grand, il aimait l'humanité, la justice et la fraternité… Georges Yu était un homme amoureux de la vie.

Mais Georges Yu n'était pas un Saint. Il était le contraire de l'ange qu'il n'aura jamais voulu être. Excessif dans ses sentiments, « Corse » dans ses passions, terribles parfois dans les jugements qu'il pouvait émettre, à l'image des déceptions qu'il pouvait ressentir et dont il se faisait parfois une « représentation shakespearienne », il était fidèle à lui-même.

Georges Yu était bien un être humain… simplement, avec sa force et ses fragilités… mais un être vrai, réel, sincère, authentique, debout, debout ! Un homme auprès duquel, comme le raconte Symca Pacanowski, l'un de ses amis, « on sent que l'on existe ». Le contraire d'un être sans saveur, sans odeur, sans couleur… le contraire de la désespérance. Le genre de type qui laisse des traces et des sédiments fertiles.

A cet égard, il fut bien, tout au long de sa vie, le jeune résistant qu'il avait été pendant la 2e guerre mondiale. Aussi, en cette veille de grande mobilisation à travers toute l'Europe, en hommage à la mémoire de Georges Yu, homme debout, libre et fraternel, en hommage également à l'humour et à l'esprit de douces facéties qui était le sien, je lève, avec vous tous, le verre de l'amitié. A votre santé, à notre santé et… à la sienne !

Son dernier message

Ecoutez le message laissé par Georges Yu à ses amis et proches.

Dossiers de presse

Téléchargez des photos en qualité maximale :

Petite balade souriante, ironique, potache ou philosophique à travers textes et citations rédigées ou adoptées par Georges Yu

« J'ai reconnu le bonheur au bruit qu'il a fait en partant »
(Jacques Prévert)

« L'éternité, c'est long, surtout vers la fin »
(Woody Allen)

« Etre dans le vent, c'est avoir un destin de feuille morte »
(Jean Guitton)

EN 1992 : « J'ai 65 ans aujourd'hui. C'est pas mal à mon âge ? Hein !? »

« Je n'ai pas peur de la mort. Mais quand elle viendra, j'aime autant être absent »
(Woody Allen)

« Il faut s'intéresser davantage à l'avenir car c'est là qu'on y passera la plupart de ses jours »
(Woody Allen)

« Même si je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites, je me battrai pour que vous puissiez continuer à le dire »
(Voltaire)

« Le voyage, c'est l'enfance retrouvée »
paraphrasant Beaudelaire

« Les gens ne meurent que si on les oublie »

« L'intelligence, c'est comme un parachute. Si on en n'a pas, on s'écrase »
(Pierre Desproges)

« Le drame du monde moderne, c'est que la bêtise s'est mise à penser »
(Jean Cocteau)

« La mort, ce n'est rien d'autre que la fin du monologue »

« Pire que le bruit des bottes : le silence des pantoufles »
(Max Frisch)

« Plus l'âme a des racines, plus haut va l'âme »

« Les Yankees sont passé de la barbarie à la décadence sans passer par la civilisation »
(Clémenceau)

« La gaieté, c'est la forme suprême du courage »
(Anatole France)

« Lorsque vous serez réunis, je serai parmi vous »
(Jésus)

« Préservez les riches de la misère car les pauvres en ont l'habitude »
(Pierre Dac)

« Il faut marcher pour que la terre tourne »

« Au restaurant, sur un nappe, Picasso dessine. Le patron demande : vous pouvez dédicacer ? Non, répond-t-il. J'ai payé le repas, je n'achète pas le restaurant »

« Le fou, c'est celui qui sait. Le sage, c'est celui qui cherche »

« Je ne parle pas aux cons, ça risquerait de les instruire »
(De Gaulle)

« Quand je vois le christ en croix, les bras m'en tombent »
(Claudel)

« On n'existe que dans le regard de l'autre »
(Albert Jacquard)

« Un mécontent, c'est un pauvre qui réfléchit »
(Talleyrand)

« L'argent est préférable à la pauvreté, ne serait-ce que pour des raisons financières »
(Woody Allen)

« Les hommes sont des femmes comme les autres »
(Marx Brothers)

« Le désespoir part toujours perdant »

« La vraie morale se moque de la morale »
(Pascal)

« L'homme est né pour le bonheur comme l'oiseau pour le vol »
(Proverbe russe)

« Pour voir les choses d'un peu plus près, il est bon de prendre de la distance »

« L'imagination est la mémoire de l'avenir »
(Robert Sabatier)

« Pour marcher au pas, pas besoin d'un cerveau. Une moelle épinière suffit »
(Albert Einstein)

« Jésus-Christ était fils de Dieu mais, de surcroît, issu d'une bonne famille, du côté de sa mère »

« Une des plus grandes fonctions de l'art est de révéler à chacun la grandeur qu'il y a en eux »
(Malraux)

« Si le bonheur t'oublie, rappelles-le »
(Prévert)

« Mourir pour le peuple, soit, vivre avec : jamais ! »
(Pierre Desproges)

« Où qu'elles te mènent, tes ailes auront raison. Pourvu qu'elles battent large. Sur un air de poisson volant »

« L'amour est charnel jusque dans l'esprit et spirituel jusque dans la chair »
(Saint Augustin)

« Si l'or, c'était de la merde, les pauvres n'auraient pas de cul »
(Proverbe portugais)

« Ceux qui ne comprennent pas le passé sont condamnés à le revivre »
(Goethe)

« La candeur sera-t-elle toujours une proie pour les vautours ? Je le crains. Alors me revient cet aphorisme : « La vengeance est un plat qui se mange froid »... encore faudra-t-il conserver de l'appétit ! … »

« Fort logiquement, les adversaires de l'avortement mettent en avant le DROIT A LA VIE. Fort logiquement, les mêmes sont souvent les adeptes les plus forcenés de la peine de mort… c'est la vie ! »

« Il est plus facile de désintégrer un atome qu'un préjugé »
(Albert Einstein)
« … de classe »
(Georges Yu)

« Ne te retournes pas sur ton passé, il pourrait te mordre »
(Jacques Prévert)

« Celui qui meurt cette année, en est quitte pour l'an prochain »
(William Shakespeare)

« Quand tu ne sais pas où tu vas, souviens-toi d'où tu viens »
(Proverbe africain)

« Une école qui ouvre, c'est une prison qui ferme »
(Victor Hugo)

« Quand le peuple se fâche, la bourgeoisie s'étonne »

« J'ai perdu mes certitudes mais pas mes illusions »
(Jorge Semprun)

« Depuis que les gens ne croient plus en Dieu, ils sont prêts à croire à n'importe qui »

Un proverbe russe dit : « Ce qui est important n'est jamais pressé, et ce qui est pressé n'est pas important »

« TO BE OR NOT TO BE »
(d'un certain William)

"Quand le sage montre la lune, le fou ne regarde que le doigt"
(proverbe chinois)

« Je vois les reflets d'une aurore dont je ne verrai pas le soleil »
(Chateaubriand)

Ni dieu ni maître